Andrew Wan a é té nommé violon solo de l’Orchestre symphonique de Montréal en 2008. À titre de soliste, il a joué à travers le monde sous la direction de chefs d’orchestre tels que Vengerov, Petrenko, [...]

Beethoven : Sonates pour violon et piano nº 6, 7 et 8
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Notre chroniqueur souligne qu’aucun musicien ne prend le pas sur l’autre dans cette interprétation habile et impeccable des sonates du grand compositeur et évoque la possibilité que cet album fasse parti des meilleurs de l’année. En lire plus et écouter l’émission ici…
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Informations sur l'album
Pour ce premier album de l’intégrale des sonates pour violon et piano de Ludwig van Beethoven (1770-1827), Andrew Wan et Charles Richard-Hamelin présentent les trois sonates de l’opus 30, qui mettent en valeur trois facettes de la personnalité de ce compositeur : si la Sixième sonate montre un Beethoven plus serein, la Septième laisse s’exprimer un côté plus tempétueux et tourmenté, tandis que la Huitième, pleine de charme, fait transparaître une pointe d’humour.
Beethoven est installé à Vienne depuis une dizaine d’années lorsqu’il compose ces trois sonates, en 1802. S’y étant fait connaître comme pianiste, professeur de piano et compositeur, il a graduellement placé cette dernière occupation au centre de ses activités, notamment en n’interprétant publiquement que ses propres compositions (ou improvisations) à partir de 1797. Au début des années 1800, il est parvenu à une notoriété qui lui assure une situation financière confortable : « Mes compositions me rapportent beaucoup d’argent, et je peux dire que j’ai plus de commandes que je ne peux en satisfaire. », écrit-il à son ami Franz Wegeler en juin 1800. Beethoven bénéficie par ailleurs du soutien de plusieurs noms importants de l’aristocratie, ce qui contribue aussi à sa sécurité matérielle.
Malgré les réussites extérieures, Beethoven vit à l’époque de la composition de ces trois sonates de grands tourments intérieurs, principalement attribuables au développement de sa surdité : apparus vers 1794, ses premiers troubles de l’ouïe ont progressé jusqu’à faire en sorte que, sept ans plus tard, Beethoven peine à entendre les sons aigus et a les oreilles qui bourdonnent jusqu’à tard dans la nuit. Tenant à cacher sa dysfonction auditive, le compositeur s’isole : de peur de ne pas entendre les gens lui répondre, il évite les conversations. Ainsi, à la douleur psychologique causée par la perte de son ouïe s’ajoute celle de la détérioration de son rapport à la société, ce qui lui cause de vives souffrances.
Le printemps de l’année 1802 est, pour Beethoven, plutôt morose : à sa surdité s’ajoutent quelques revers professionnels, qui font en sorte que son médecin lui suggère une cure de silence et de solitude, loin des soucis du quotidien. À la fin du mois d’avril, le compositeur s’installe donc dans le paisible village d’Heiligenstadt, au nord de Vienne. Il y restera jusqu’à l’automne, et y terminera entre autres sa Deuxième symphonie et les Trois sonates pour violon et piano, op. 30.
La sixième Sonate pour violon et piano
La Sonate n° 6 en la majeur, op. 30 n° 1, est l’une de celles que l’on entend le plus rarement parmi les dix sonates pour violon et piano de Beethoven. Son Allegro initial s’ouvre avec un thème calme et contrapuntique qui donne le ton pour le reste du mouvement, dont la texture épurée évoque une écriture pour trio à cordes. Le deuxième mouvement, en ré majeur, a un caractère résolument mélancolique : l’inlassable accompagnement en rythme pointé, joué à la main gauche du piano, fait penser à un battement de coeur, tandis que l’harmonie se colore souvent de l’accord de si mineur. Beethoven écrit une première tentative de troisième mouvement pour cette sonate, un Andante con variazioni qu’il a mis de côté (et qu’il utilisera plus tard en guise de finale pour la Sonate « à Kreutzer », op. 47) et remplacé par un Allegretto con variazioni. Comme le premier mouvement, celui-ci s’ouvre de manière plutôt contrapuntique : dès les premières mesures, la basse (jouée par la main gauche du piano) imite le thème. Plutôt enjoué, celui-ci se termine avec un motif sautillant, formé de la répétition du rythme double-croche – croche pointée. La première variation met le piano en valeur avec de rapides triolets joués staccato, où les deux mains s’alternent. Après une deuxième variation à l’articulation beaucoup plus lisse, la troisième ramène l’idée de mouvement perpétuel instaurée dans la première variation : la main gauche du piano reprend les motifs de gamme en triolets, tandis que la main droite et le violon s’échangent, en imitation, de brèves interventions issues du thème. La quatrième variation ressemble à un récitatif, où s’alternent accords de violon et commentaires du piano. En la mineur, la cinquième variation propose une écriture fuguée évoquant Bach. En guise de transition vers la sixième et dernière variation, Beethoven allonge le motif sautillant qui clôt le thème en un decrescendo qui avance, comme à tâtons, vers la tonalité initiale de la majeur. La dernière variation, d’un caractère généralement festif, comporte cependant un curieux moment d’errance, où la musique s’égare dans des harmonies plutôt éloignées du ton principal, tandis que la main droite du piano s’obstine à jouer des notes répétées.
La septième Sonate pour violon et piano
La Sonate n° 7 en do mineur, op. 30 n° 2, est peut-être la plus typiquement « beethovénienne » des trois de l’opus 30 : déjà, on peut y entendre la veine héroïque qui se développera davantage dans ses oeuvres ultérieures. Dans l’Allegro con brio initial se déploie une texture sonore d’une intensité jamais encore égalée dans les sonates pour violon et piano précédentes : des octaves alternées, des accords fortissimo pleins aux deux mains du piano, de grands contrastes de nuances, de redoutables traits de virtuosité aux deux instruments rendent ce mouvement très dramatique. Le deuxième mouvement s’ouvre avec un solo où le piano énonce un thème tendre, qui réapparaîtra avec plusieurs accompagnements différents tout au long du mouvement, comme suivant un principe de variations improvisées. Après ces deux mouvements plutôt chargés émotionnellement survient un Scherzo très léger, un peu hors contexte avec sa mélodie coquine, en do majeur. Le quatrième mouvement, avec son premier thème mesquin et hachuré, présente un caractère et un univers sonore qui évoquent ceux du premier. L’oeuvre se termine par une tempétueuse coda, marquée « presto ».
La huitième Sonate pour violon et piano
La Sonate n° 8 en sol majeur, op. 30 n° 3, qui est la plus brève des trois sonates ici présentées, évoque – notamment par son humour – la musique de Joseph Haydn. Le premier thème du mouvement initial peut presque s’entendre comme une blague musicale où les deux instruments, après avoir joué à l’unisson, ne s’entendent pas sur qui aura le dernier mot. Le deuxième groupe thématique comporte un passage en ré mineur dont le caractère, la tonalité et la texture, avec une batterie de doubles-croches au piano, n’est pas sans rappeler la Sonate pour piano, op. 31, n° 2, surnommée « La Tempête », également terminée lors du séjour à Heiligenstadt. Le deuxième mouvement, Tempo di minuetto, porte l’indication « ma molto moderato e grazioso ». Lyrique, avec un thème doux-amer, celui-ci est ponctué de sections en sol mineur au caractère plus inquiet. Par sa forme, son énergie rythmique et son côté folklorique – particulièrement dans l’écriture violonistique –, le dernier mouvement de cette sonate évoque le Rondo all’Ongarese qui clôt le Trio avec piano n° 39 en sol majeur de Haydn.
© Florence Brassard