Le Canadian National Brass Project a été fondé en 2015 par James Sommerville et Sasha Johnson. Il réunit des instrumentistes de cuivres et des percussionnistes provenant de quinze grands orchestres du [...]

Constellations
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Certaines habiletés, une fois acquises, ne se perdent pas. Enfourcher son vélo est souvent cité en exemple et s’avère un jeu d’enfant lorsqu’on a déjà appris à le faire.
Jouer d’un instrument de cuivre n’est pas comme faire du vélo. Apprendre à faire vibrer ses lèvres dans une embouchure fixée à un tube n’est déjà pas chose facile. Le faire de manière à produire des sons d’une beauté éthérée exige des décennies. Seule la dépendance aux sentiments de sacrifice et d’accomplissement entraîne ses tributaires à s’y plier encore et encore.
Le Canadian National Brass Project abrite l’unité des soins intensifs de cette affliction où d’éminents membres issus d’orchestres symphoniques au Canada et aux États-Unis s’exercent chaque année, des milliers d’heures durant. L’été venu, ils parcourent de grandes distances afin de se mettre à l’œuvre. Leur union a donné lieu à un magnifique premier enregistrement en 2017, et au deuxième, Constellations, enregistré pendant l’été 2018.
Lohengrin : Procession d’Elsa vers la cathédrale (1850) de Richard Wagner arrangé pour cuivres par Jay Friedman
On pourrait comparer le dévouement héroïque de ces musiciens envers leur art à celui dont fait preuve une princesse qui accepte d’épouser un mystérieux chevalier et de ne jamais lui demander son nom. Mais à l’inverse du mariage d’Elsa dans Lohengrin, cet arrangement de la Procession vers la cathédrale mène à un bonheur indéfectible.
O Magnum Mysterium (1587) et Sancta Maria (1597) de Giovanni Gabrieli arrangé pour cuivres par Timothy Higgins
Giovanni Gabrieli composa ses œuvres O Magnum Mysterium (1587) et Sancta Maria (1597) pour qu’elles soient chantées dans la Basilique Saint-Marc de Venise, célèbre pour la subtilité de son acoustique, où il était directeur musical. Les deux pièces furent conçues pour voix seulement, mais si Gabrieli avait été ici pour éprouver les sonorités chaudes et onctueuses du Canadian National Brass Project, nul doute qu’il aurait goûté à la volupté.
Sanctus d’Ola Gjeilo arrangé pour cuivres par Taz Eddy
Le Sanctus du compositeur norvégien Ola Gjeilo émergea d’un clavier en plastique bon marché dans une chambre d’étudiant du Royal College of Music. Depuis, la pièce a été interprétée par diverses chorales, et grâce à l’arrangement du trompettiste canadien Taz Eddy, elle s’est taillé une place de choix dans le répertoire pour cuivres.
Les Planètes (1916) de Gustav Holst arrangé pour cuivres par Angus Armstrong
L’orchestration complexe des Planètes de Gustav Holst (1916) était destinée aux grands orchestres symphoniques. C’est avec brio qu’Angus Armstrong a adapté l’œuvre pour un effectif réduit de 25 instruments de cuivre et percussions (joués par d’excellents musiciens), et ce, sans que la richesse des couleurs ne soit perdue.
Sensemayá (1937) de Silvestre Revueltas arrangé pour cuivres par Bruce Roberts
Le chef-d’œuvre de Revueltas, Sensemayá (1937), raconte l’histoire d’un sacrifice rituel à un dieu-serpent qui détient à la fois le pouvoir de rendre la santé et celui de répandre la peste. Le Canadian National Brass Project en livre une prestation magistrale ; un véritable tour de force.
L’Ouverture solennelle 1812 en mi bémol majeur, op. 49 (1880) de Piotr Ilitch Tchaïkovski arrangé pour cuivres par Robert Fraser
Enfin, Tchaïkovski a traduit la défaite cuisante de Napoléon en l’Année 1812 par une musique frôlant la poésie (quoiqu’elle soit, de son propre aveu, « très bruyante »). L’arrangement de Robert Fraser, empreint de cette poésie, n’en est pas moins percutant pour autant.
Et voilà une « constellation » de sept pièces interprétées par 25 artistes dévoués, atteints de ce grand mal incurable des instrumentistes de cuivres, des cas parmi les plus spectaculaires jamais répertoriés. Ce qu’ils font peut nous sembler inouï ; pour eux, c’est un jeu d’enfant.
© Tom Allen, auteur, animateur radio, musicien